MICHEL SUFFRAN ECRIVAIN A BORDEAUX
Michel Suffran est né à Bordeaux le 1er novembre 1931 –
Michel Suffran fut l’un des écrivains bordelais les plus prolifiques et les plus talentueux du dernier demi-siècle (Jean Cayrol, Robert Escarpit, Jean Forton…)
Plus d’une quarantaine de ses oeuvres créées sur France Culture et un grand nombre de pièces de théâtre représentées tant soit à Bordeaux la ville où il a toujours vécu que sur des théâtres parisiens ou par diverses troupes en Région.
Cet entretien mené par André Limoges, réalisateur, et Madeleine Debras, comédienne, a été enregistré le 19 octobre 2016, au domicile de l’auteur.

Michel Suffran et André Limoges dans les studios de FR3 Bordeaux Aquitaine le 7 avril 1969 lors d’une Carte Blanche consacrée à l’écrivain
André Limoges : Michel Suffran vous avez écrit une centaine d’œuvres de 1956 à aujourd’hui, qui ont été jouées soit au théâtre, aussi bien à Paris qu’à Bordeaux – soit à la Radio – Plus de quarante-cinq œuvres diverses pour la Radio, la plupart diffusées sur France Culture : dramatiques, essais – Et je constate que l’un de vos premiers écrits c’est pour la Radio que vous l’avez composé en 1956, à Bordeaux, où vous demeurez toujours : « Petite musique de nuit », réalisée à l’époque par Georges Gravier.
Pourquoi êtes-vous venu à l’écriture radiophonique, dès vos débuts d’écrivain ?
Michel Suffran : Il y a deux raisons. La première fut que la Télévision était inexistante. Absolument inexistante à l’époque où j’étais enfant ou du moins elle était expérimentale. C’est l’écoute de la Radio qui a servi d’aliment à mes rêves. Cela m’a presque formé. Quand j’étais tout petit, avant cinq ans, ma mère me lisait les Contes d’Andersen, et la voix de ma mère, quand je relis les Contes d’Andersen, accompagne totalement cette lecture-là. Je crois que la vocalité est la chose la plus importante pour un écrivain, même s’il n’écrit pas pour le théâtre et la radio.
C’est vrai pour Marcel Schwob, pour Colette, pour Giono, c’est vrai pour Mauriac :
Les grands écrivains ont une voix. La Radio est la mise en évidence de ce filigrane de l’écriture qu’est la voix. La lecture aussi – On en fait de plus en plus aujourd’hui. Je crois beaucoup que la lecture d’un texte peut apporter à des gens qui ne liront peut-être pas. Je pense qu’on peut lire Montaigne, ou qu’on peut lire Pascal chez des personnes qui ne seront pas intimidées par la lecture des Essais, ou des Pensées. Un texte peut éclairer, sans qu’il y ait besoin de commentaires.
A.L : Par quel phénomène, en 1956, jeune écrivain, vous avez eu l’audace d’aller présenter votre premier texte à la Radio, celle de Bordeaux, en l’occurrence ?
Michel Suffran : C’est un phénomène naturel, lié au fait que la Radio était pour moi un instrument de fascination déjà. Je me rappelle le Commissaire Bourrel, les émissions de Claude Santelli, des choses qui avaient pour moi un impact émotionnel qui s’inscrivait dans mon subconscient. L’écriture de ce premier texte que vous évoquez « Petite musique de nuit » est partie de la proposition faite par Bordeaux-Aquitaine de pièces radiophoniques. Et j’avais présenté cette pièce à ce concours, innocemment. J’ai eu la chance d’être retenu, enregistré, fort bien d’ailleurs par Georges Gravier qui en fait la mise en ondes. La pièce est allée à Paris, elle a eu la récompense suprême. Ce qui m’a à la fois ébloui, encouragé et cela m’a porté sur les chemins de l’écriture radiophonique. A tel point que pendant une dizaine d’années je n’ai pas éprouvé le besoin réel de faire autre chose.
A.L : Vous venez de dire « l’écriture radiophonique », le mot est lâché. Comment définiriez- vous la spécificité de cette écriture-là ?
M.S : C’est la possibilité de donner à l’imaginaire d’un personnage, qui n’est pas spectateur, et pour cause, il n’y a pas d’élément visuel comme au théâtre ou au cinéma à fortiori, de recréer un monde, seulement à partir de la voix des comédiens, des textes qu’il lit, des bruitages, des musiques. Je prends la comparaison avec l’écoute d’une partition musicale : un musicologue lit une partition sur le papier. Moi j’en suis incapable. Beaucoup de gens qui aiment la musique n’ont pas cette capacité de créer à partir des notes de la partition. Mais quand la musique se fait entendre, on l’écoute, elle va à toutes les personnes qui ont une sensibilité, c’est-à-dire au plus grand nombre. La Radio était cela pour moi – Et c’est ainsi que j’ai souvent coopéré à mettre des œuvres que j’aimais en évidence à travers l’acte radiophonique. Elle a créé un consensus que je ne retrouve plus aujourd’hui en écrivant. La Radio existe toujours mais il n’y a plus cette exaltation-là.
A.L : Qu’avez-vous ressenti lorsque vous êtes rentré pour la première fois dans un studio : enfermé dans une cabine avec un technicien, un réalisateur ? On écoute d’abord l’enregistrement, on assiste au montage – et je sais pour avoir été votre réalisateur que vous assistez à la totalité du montage. Devant cette ambiance si spécifique, quelle a été votre réaction ?
M.S : Vous savez, à la Radio, et au Théâtre non plus d’ailleurs, je n’ai jamais été quelqu’un d’interventionniste. Je n’ai pas la capacité de cela. J’ai été bien sûr, très ébloui, très ému, que l’on puisse prendre mes textes en considération. La Radio interprétée par des comédiens de grande envergure, comme Jean Topart, Michel Bouquet, ce n’était pas une machine à sous, loin de là. C’était vraiment un art à part entière – Alors j’étais dans un grand état d’émerveillement – J’étais l’innocent du village – Comme disait Balzac « j’avais l’innocence départementale » ! Je me trouvais là, à la Radio, avec un très grand bonheur. J’avais donné le bois pour le feu, mais je n’avais pas donné l’étincelle et encore moins la flamme qui en jaillirait. J’avais besoin que mes textes soient révélés par des voix, qui me restent chères et précieuses, qui pour moi étaient presque miraculeuses, voilà, voilà.
Madeleine Debras : Michel Suffran n’êtes-vous pas, aussi, très sensible au dessin, au graphisme. Vous êtes dessinateur vous-même – Est-ce que vous n’avez pas le désir, à travers la Radio, de créer un univers, de susciter des images ?
M.S : Cela est très juste, ce que vous dites là Madeleine : le mot imaginaire, imagination donne l’idée d’une vision. La Radio est un visuel que l’on suscite à l’intérieur de l’imaginaire des gens. Imaginaire qui est souvent brimé. La Radio est un cinéma sans image si vous voulez. Mais c’est plus subtil encore. Là, l’imaginaire naît à la fois des bruitages et de la musique, mais surtout des voix des comédiens et de l’habileté du metteur en ondes, bien sûr. Je n’avais pas l’impression que la Radio était un art de pure vocalité. Elle l’est initialement essentiellement. Mais vous avez raison Madeleine, ce sont des images qui naissent, plus encore qu’une écoute un peu intellectuelle.
M.D : Lorsque l’on a eu la chance d’être l’interprète de quelques-unes de vos pièces, quand on a eu vos manuscrits en mains, on voit à quel point vous avez le souci du détail. Il y a un environnement sonore précisé pour chaque plan, les bruitages sont définis avec exactitude. La seule lecture du texte transporte dans un univers spécifique, celui de la Radio.
M.S : Merci beaucoup pour votre générosité. C’est vrai, encore une fois la vocalité, même dans une œuvre écrite, est quelque chose qui me paraît l’élément moteur – Les grands écrivains, comme Colette, Duhamel, ont une voix. Cette voix m’a toujours été chère. Ce sont des voix intérieures. Mais qui me paraissent plus pures –
C’est un dialogue la Radio, une pièce de théâtre aussi. Mais avec un public assez vaste – Au théâtre on sent les réactions du public. A la Radio on ne peut pas. Le lecteur qui lit un de vos livres souvent vous ne le connaissez pas. Les gens qui écoutent la Radio bien sûr on ne les connait pas non plus, mais on sent qu’on leur apporte quelque chose de vivant, de vivace. Ce qui pour moi est incomparable. La télévision elle –même exerce une fascination totale aujourd’hui mais elle laisse la part tellement libre à l’imagination et au libre arbitre du téléspectateur !
Le dialogue avec l’invisible, à la Radio, c’est un ressenti. Cela commence avec l’incarnation des voix des comédiens – La voix de Topart avec qui j’ai beaucoup travaillé ; et la voix de Bouquet – deux tonalités différentes – ont donné à mon écriture une ampleur, un surplus qu’elle n’avait sans doute pas dans ma propre création. C’est une fusion, un artisanat que la Radio – C’est un travail, d’enregistrement, de montage que l’auditeur ne soupçonne pas toujours – Et cette fusion entre le technicien, le metteur en ondes, les comédiens, l’auteur, est quelque chose qui pour moi demeure des instants d’émerveillement qui me poursuivent encore.
A.L : Vous avez cité Topart et Bouquet, interprètes privilégiés de vos textes. D’autres comédiens ont servi vos manuscrits : Maria Casarès, François Périer, Loleh Bellon, Alain Cuny, Roger Blin, Charles Vanel, Coluche !…
M.S : Le grand respect que j’ai pour les acteurs de la Radio tient justement à l’humilité de leur art. Il n’y a pas là, évidemment la notoriété que donne le cinéma, ou même le théâtre. Mais cet « artisanat » correspond pour moi à quelque chose qui est fondamental dans une œuvre. Une écriture doit être innocentée, travaillée, retravaillée – Même aujourd’hui dans un manuscrit en cours je colle, je recolle.
A.L : Ce sont les paperolles de Proust.
M.S : Voilà ! Ce sont les paperolles de Proust – toutes proportions gardées pour moi – Mais il y a ce travail fondamental – Et je crois que, même dans l’écriture romanesque, ou dans les essais ou textes historiques que j’écris pour l’édition, cela est resté fondamental. La Radio est pour moi une source quasi matricielle dont je ne me suis pas démuni, et dont je ne tiens pas à me démunir bien au contraire.
A.L : Michel Suffran, jeune stagiaire réalisateur, je vous ai connu en 1961. Vous aviez déjà été distingué, vous nous l’avez dit au début de cet entretien, par un prix d’écriture radiophonique en 1956, Et Paul Gilson, ce merveilleux directeur des services artistiques de la Radio, avait souhaité que ces jeunes futurs réalisateurs rencontrent un auteur radiophonique, et avait désiré que ce soit vous. Cela était une bien belle reconnaissance pour vous !
M.S : Paul Gilson était un poète, vous le savez, un magicien du verbe. Il était un spécialiste de Lewis Carrol. Je suis scandalisé par le fait que son œuvre ne soit pas rééditée, à ma connaissance. J’ai la chance d’avoir un « Poètes d’aujourd’hui » de Seghers où il y a quelques essais de Gilson mais je ne comprends absolument pas que la poésie de Gilson ne soit pas mise en valeur, et à l’honneur.
A.L : Nous avons parlé des comédiens qui ont servi vos textes – vous avez eu aussi dans votre longue carrière radiophonique de 1956 à 2002, d’excellents réalisateurs : Alain Trutat, Jean-Jacques Vierne, René Wilmet, Claude Mourthé, René Jeantet, Catherine Audemer. Catherine Audemer, que je cite parce qu’elle a réalisé quatre de vos pièces à Bordeaux, dont une « Verlaine twist » a obtenu le premier prix des œuvres radiophoniques en 1964. Ces réalisateurs ont eu, je suppose, une importance dans la relation que vous avez eue avec le monde Radio ?
M.S : Oui, effectivement. Ce qui me touche dans la Radio, c’est ce sentiment de familiarité, de famille je veux dire. On est tous dans la même barque : l’auteur qui donne le point de départ, le réalisateur qui met en œuvre, qui bâtit à partir de ces voix. Il faut parfois modifier – Justement le réalisateur le sent intuitivement, et les comédiens qui apportent la touche finale. J’allais oublier le dernier : l’auditeur, dont on ne sait pas la réaction immédiate – l’auditeur est un solitaire en général. On écoute la Radio dans une pièce sombre – avec autrefois le petit point rouge du poste allumé. Il n’y a là pas autre chose que la vocalité et l’écoute – « L’œil écoute » disait Claudel. Cela m’émeut profondément et me rapproche de la lecture : un livre lu par un individu, lequel vous n’en savez rien, cette espèce de contact par la voix des ondes est pour moi quelque chose de totalement magique – Le dépouillement même.
A.L : Lorsque je reprends la liste fort longue de vos œuvres, l’énuméré lui-même est poésie et dit bien votre monde : Le Petit Prince, Alice, Monelle, Annabel Lee, Verlaine, Dorian…
M.S : Il y a toujours un élément dont nous ne sommes pas conscients au départ – J’écris – Je suis d’ailleurs resté un lecteur impénitent – et je ne fais pas de scission entre lecture et écriture – Ce sont les deux battants d’une même cloche – Il y a osmose – Et c’est pour cela que beaucoup de mes œuvres – enfin un certain nombre sont adaptées de textes qui, à l’époque, étaient très peu connus. Je crois que la voix est le meilleur moyen de tirer un texte vers l’intellectualisme.
M.D : Michel, vous parlez de la voix. Est-ce que votre imaginaire a été nourri aussi de rencontres avec les objets, avec les livres – vous êtes un chineur impénitent. Votre univers est enrichi de dessins, de peintures, de fusains, d’eaux-fortes. Ces objets, ces rencontres ont-elles suscité également l’idée des écritures radiophoniques ?
M.S : Oui, de la manière la plus évidente. C’est une osmose – Je ne crois pas que tout vienne d’une manière extemporanée, en fonction d’une vision purement intellectuelle – Mais c’est un subconscient – Nous n’avons pas une idée de base très claire – Et heureusement d’ailleurs parce que si nous le savions, nous serions en quelque sorte des fabricants. On est beaucoup plus « agi », pour employer un terme philosophique – qu’on est acteur. On redit les voix intérieures – Ces voix du silence dont parle Malraux à propos de la peinture. Et les voix du silence sortent aussi du silence des pages imprimées. Je suis resté dans cette idée que les livres qui sont les plus fraternels pour moi sont les livres qui m’ont parlé en les lisant – Quand j’ouvre un livre sur l’étal d’un libraire je sais très vite s’il est fait pour moi. Je le sais, je le sais. Avec Le Clézio cela a été évident. Ce sont là des choses que l’on ne peut pas définir.
A.L : Deux écrivains semblent avoir accompagné votre œuvre : pour l’un vous avez eu la chance de l’approcher, de l’écouter longuement : François Mauriac, dont vous avez adapté plusieurs ouvrages – Je pense à « La lueur d’une lampe éteinte » ou encore « Un adolescent d’autrefois ». Pour l’autre, vous ne l’avez pas connu : Dino Buzzati pour lequel vous avez écrit une adaptation de son roman « Un amour » – Adaptation théâtrale reprise 3 fois à Bordeaux et à Paris.
M.S : La rencontre avec Mauriac a été liée par la Télévision. Il faisait à l’époque des chroniques qui s’appelaient « Les hasards de la fourchette » (dans le Figaro ou l’Express) sur les pièces de télévision qui passaient sur l’unique chaîne existant alors. Deux pièces de moi étaient passées presque de façon consécutive. Pour « Christine ou la pluie sur la mer » (1963) sa critique m’avait un peu effrayé – Mais pour « Les Forêts en septembre » (1964) avec Patrick Dewaere, il fut élogieux.
A.L : « Les Forêts en septembre » ont été réalisées à Bordeaux.
M.S : A Bordeaux, effectivement, par Marc Chevillot. J’avais écrit à François Mauriac comme l’on écrit au Père Noêl « Monsieur François Mauriac, au ciel ! » La lettre avait été transmise – A ma grande surprise il m’a répondu en me disant « Venez me voir à Malagar à la prochaine vendange – je suis content de voir qu’il y a de jeunes écrivains à Bordeaux. » Et j’y suis allé – Ce contact avec Mauriac a été extrêmement vivifiant pour moi. L’admiration que j’avais déjà pour lui s’est doublée d’un sentiment affectueux, parce que l’homme était particulièrement attachant, émouvant, particulièrement drôle, et il était, quand on le connaissait un peu, le contraire du personnage austère que l’on a fait croire – Avoir connu Mauriac est pour moi essentiel.
Pour Buzzati cela a été quelque peu différent – C’est la lecture d’abord du « Désert des Tartares », et tout ce qui a suivi – Mais « Le Désert des Tartares », s’il y a un livre, je ne dis pas qui a bouleversé ma vie, c’est un peu grandiloquent mais qui a modifié ma sensibilité, c’est le Désert des Tartares- ça reste – Le Désert des Tartares, cet homme Drogo, qui perd sa vie à attendre une invasion qui ne vient pas – Il est raté en quelque sorte, et son existence en même temps – A la fin, il se rend compte de la victoire sur lui-même. Il meurt dans une auberge perdue.
A.L : Et il sourit.
M.S : Et il sourit – Les derniers mots : « Et seul dans l’ombre il sourit ». L’idée qu’une vie réussie, selon le monde, peut être une vie ratée dans le monde intérieur et que l’inverse peut être vrai, sans masochisme. J’étais très jeune lors de la découverte de ce livre – Cela a été à tel point émouvant, que peu à peu, ayant lu les autres livres de Buzzati, avec un universitaire, Yves Panafieu, nous avons fondé l’Association des amis de Dino Buzzati.
J’aurais pu le connaître, malheureusement Buzzati était mort quelques mois auparavant. Nous sommes allés à la recherche de sa famille, sa femme, son frère, sa mère, sa sœur, dans les Dolomites. Il n’y a que lui que je n’ai pas connu. Mais il me semble l’avoir connu, c’est étrange, j’ai l’impression de l’avoir rencontré. Il y a des personnes mythiques comme cela dont il semble que l’on soit familier.
M.D : Votre œuvre d’écrivain radiophonique et de dramaturge a pris le pas sur votre premier métier, puisque vous êtes médecin au départ. A part peut être dans certaines œuvres où vous évoquez la folie, comme dans Maupassant, votre métier de médecin a-t-il eu une influence sur les textes que vous avez écrits ?
M.S : Ce que vous dites là est subtil. Je le savais – Mais je m’aperçois en vous écoutant que, autant j’ai été médecin du travail (On n’a pas le Nobel de médecine du travail !) autant j’ai été réticent, sauf cas exceptionnel, à mettre en ouvrage, comme TcheKov l’a fait en transposant, à mettre le métier d’écrivain d’une manière visible et audible dans mon travail radiophonique. J’ai laissé la part de l’imaginaire – Autant je suis sûr cependant qu’il y a eu une interpénétration par le fait que la médecine du travail est une médecine de contact humain. Avec des gens de milieux très rudes, défavorisés, des gens qui travaillent en usine. Je me souviens de personnes, des femmes d’ailleurs, qui faisaient des ampoules médicamenteuses, à Bordeaux, dans une entreprise près de la gare – Il y avait une poussière de verre partout qui était insupportable ; et le bruit sur tout cela – Ces personnes-là m’ont appris certainement plus encore que des contacts intellectuels plus éloquents. Je crois que c’est aussi pour eux que d’une certaine manière j’ai pu écrire – Sans pour cela les citer et les nommer. Mais ce contact humain a enrichi mon subconscient et a influé sur l’acte radiophonique.
Michel Suffran est décédé le 5 juillet 2018 à Bordeaux.

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